DECOMPENSATION CARDIAQUE


Principales étiologies à envisager
1. Atteinte myocardique
- maladie ischémique
- myocardite : cf myocardite toxique
- cardiomyopathie (anthracyclines)
2. Surcharge ventriculaire
- HTA systémique
- valvulopathie
3. Troubles restrictifs et obstructifs
- sténose mitrale
- tamponnade cardiaque
- péricardite constrictive
- cardiomyopathies restrictives
4. Coeur pulmonaire

Mécanisme : on distingue deux grands mécanismes : l'insuffisance cardiaque à fraction d'éjection ventriculaire réduite (dite "insuffisance cardiaque systolique") et celle à fraction d'éjection conservée (dite "insuffisance cardiaque diastolique"). Le pronostic est relativement similaire. On ne peut donc pas se baser sur la seule fraction d'éjection systolique pour diagnostiquer une insuffisance cardiaque.
Le diagnostic différentiel se fera par échocardiographie. Les principales causes d'insuffisance cardiaque diastolique aiguë sont : avec cardiopathie préexistante avec tableau mixte (cardiopathies dilatées avec dysfonction systolique) ou pur (cardiopathies hypertrophiques: HTA, familiale,...), sans cardiopathie préexistante (ischémie myocardique, sepsis, tachycardies, fibrillation auriculaire).
Pour la décompensation cardiaque droite : voir insuffisance cardiaque droite

Étiologies les plus fréquentes :
- FEVG > 50 % : cardiopathie hypertensive (53 %), cardiopathie ischémique (28%), cardiopathie valvulaire (13 %), divers (dont cardiopathies restrictives) (5,7 %). Les cardiomyopathies hypertrophiques primitives et les amyloïdoses sont des formes caricaturales d'insuffisance cardiaque diastolique mais sont rares.
- FEVG < 50 % : cardiopathie ischémique (49 %), cardiopathies dilatées (28 %), cardiopathies hypertensives (10 %), cardiopathies valvulaires (7,8 %), divers (5,2 %)

Tableau clinique
- dyspnée
- fatigue
ces deux symptômes surviennent classiquement d'abord à l'effort et puis au repos mais une présentation inaugurale aiguë est possible
- orthopnée
- toux sèche souvent la nuit en position couchée ou à l'effort
-Oligurie, nycturie
- Chez le sujet âgé : altération de l'état général, anxiété, troubles confusionnels et cognitifs
A l'examen physique:
- tachycardie, bruits de galop
- râles crépitants secs prédominant aux bases, parfois expiratoires (sibilances)
- jugulaires turgescentes, reflux hépatojugulaire, foie de stase, oedème périphérique, anasarque
- signes de bas débit : hypotension, confusion, lopothymie, marbrures, cyanose des extrémités
- signes généraux : cachexie

Présentations aiguës
- Oedème aigu pulmonaire
- Choc cardiogénique
- Lipothymie et syncope
- Mort subite
- Palpitations avec éventuels troubles du rythme
- Exacerbation d'une pathologie pulmonaire
- Embolie artérielle
- Embolie pulmonaire
- Insuffisance rénale
- Hyponatrémie
- Dyskaliémie

Examens complémentaires
- Électrocardiogramme
- Radiographie du thorax
- Échodoppler cardiaque
- Dosage des peptides natriurétiques de type B (BNP, NT-pro-BNP)

Principaux facteurs précipitants à rechercher
- non application du traitement
- apports salés
- aggravation hypertension
- arythmies
- intoxication digitalique
- embolie pulmonaire
- endocardite
- sepsis
- infarctus myocardique
- anémie
- hyperhydratation
- troubles ioniques (K, Mg)
- médicaments
: b-bloquants, corticoïdes, antagonistes calciques, antiarythmiques, anthracyclines, oestrogènes, alcool, bévacuzimab, ...

Traitement
1. Régime pauvre en sel (! attention aux apports i.v., notamment avec les antibiotiques)
2. Repos si nécessaire
3. Diurétiques : réduire la congestion circulatoire
* si sévère : diurétique de l’anse (! hypokaliémie): ex. furosémide 20 à 40 mg/j
* sinon : spironolactone : 25 - 50 mg/j
Attention au risque d'hyperkaliémie
* contre-indications : hypotension artérielle symptomatique, troubles ioniques, insuffisance rénale s'aggravant
4. Vasodilatateurs : diminuer la résistance à l’éjection ventriculaire et augmenter la capacitance du réservoir veineux
a) inhibiteurs de l’enzyme de conversion de l’angiotensine
- captopril : débuter à 2 x 6,25 mg/j en augmentant progressivement jusqu’à 3 prises par jour jusqu’à une dose de 3 x 50 mg/j
- enalapril : débuter à 2,5 mg/j en augmentant progressivement jusqu’à 2 prises par jour de 10 mg
- lisinopril : débuter à 2,5 mg/j en 1x jusqu’à 20 mg/j.
- fosinopril : débuter à 10 mg/j en 1x jusqu’à 40 mg/j (risque moindre d’insuffisance rénale pour des raisons de catabolisme)
effets secondaires : hypotension, urémie, toux, voire rash et angioedème; ne pas associer aux AINS (risque d’insuffisance rénale) et spironolactone (risque d’hyperkaliémie).
b) veineux : dérivés nitrés (ex.dinitrate d'isosorbide 40 mg 3x/j p.o.) à adapter également progressivement aux paramètres hémodynamiques (maintenir TAs à ~100 mmHg) ; éventuellement en association avec l’hydralazine ½ co à 25 mg 3 x/j à augmenter progressivement jusqu’à 3 x 50 mg/j
Pas d'impact sur la survie et donc à ne pas utiliser dans le traitement à long terme (sauf cardiomyopathie ischémique)
5. Digitaliques : ex. digoxine 1 co à 0,25 mg à adapter à la fonction et au dosage sérique (valeurs normales : 0,5 à 2 ng/ml).
6. b-bloquants: ex. métoprolol : 6,25 mg 2x/j (à augmenter progressivement à 50 - 75 mg 2x/j) ou bisoprolol : 1,25 mg/j(à augmenter progressivement à 5 - 10 mg/j)
à n'introduire qu'après contrôle de la congestion
si décompensation survient : ne pas arrêter !

NB : Les thérapeutiques reprises aux points 4, 5 et 6 seront introduites progressivement et prudemment.

En pratique: voir bénéfice des traitements médicamenteux
Classe I NYHA (New York heart association): patient asymptomatique
- IEC à fortes doses en cas de dysfonction VG
- + bbloquant si secondaire à infarctus myocardique
Classes II et III NYHA : limitation modeste ou marquée de l'activité ordinaire
- IEC à dose optimale
- + bbloquant si hémodynamiquement stable
- + diurétique initialement
- + spironolactone si classe III en cas de persistance de rétention hydrique
Classe IV NYHA : symptômes présents au repos et accrus par l'activité physique
- IEC + bbloquant + diurétique + spironolactone + éventuellement digoxine
- éventuellement cures itératives de 24 à 72h de dobutamine iv
- éventuellement envisager transplantation cardiaque