ALIMENTATION ENTERALE
a. Indications
- jeûne total ou partiel de plus d'une semaine prévisible
- plus précocement en cas d'état de dénutrition préalable ou de risque nutritionnel particulier lié à l'affection aiguë
Non indications:
- pour les patients non dénutris chez qui le jeûne prévisible est inférieur à une semaine et le niveau d'agression peu sévère
- pour les patients dont le pronostic vital est engagé à court terme et pour lesquels les autres thérapeutiques curatives ont été arrêtées
Contre-indications :
- les patients comateux sans protection des voies aériennes supérieures
- l'instabilité hémodynamique à la phase initiale
- l'occlusion digestive mécanique
b. Choix du site d'installation :
- gastrique : dans tous les cas sauf les indications de site jéjunal
*sonde nasogastrique (en silicone ou en polyuréthane; <= 14 F; radiopaque)
*gastrostomie
- jejunal : en cas de pathologie sus-mésocolique(oesophagectomie, gastrectomie, pancréatite aiguë, fistules gastroduodénales) ou de gastroparésie (cf ventilation artificielle sous sédation)
*sonde nasojéjunale
*jejunostomie
Contrôle de la position de la sonde: quotidien et par radiographie
c. Apports caloriques et nutriments:
Apports énergétiques
- Apport énergétique quotidien usuel : 25 à 35 kcal/kg (calories totales, apport protéique inclus)
- En période aiguë: ne pas dépasser la couverture de 100 % de la dépense énergétique estimée
- En phase de récupération (ou “post-agressive”) : des niveaux supérieurs à 35 kcal/kg/j peuvent être requis
- si après 3-4 j, complications ou intolérance : envisager recours à une nutrition mixte, entérale et parentérale
- composition: glucides (40 à 60 % des apports énergétiques totaux), lipides (20 à 40 %) et protéines (15 à 25 %), sans oublier vitamines et oligo-éléments
- produits : Seuls, les produits industriels doivent être utilisés, et ce dans leur conditionnement d'origine
Par exemple :
* produits semi-élémentaires : en cas de grêle court ou radique ou d'insuffisance pancréatique
ex. Peptison SterifloR (Nutricia)
* produits polymériques ternaires : standard
ex. spécialités NutrisonR (Nutricia)
° standard SterifloR : bouteille de 1000 ml liquide et prêt à l’emploi ; par 100 ml : protéines 4g; lipides 3,9g; glucides 12,3g; lactose < 25mg; Na 80 mg; 1 Kcal/ml
° Nutrison Steriflo SojaR :par 100 ml : protéines 4g; lipides 3,9g; glucides 12,3g; lactose < 5mg; Na 80mg; 1 Kcal/ml
° Multi FibreR :
d.Mise en route
- précocement (< douzième heure) a été démontré chez les patients chirurgicaux (chirurgie viscérale majeure)
- à début continu et à l'aide d'une pompe péristaltique
- estimer la tolérance digestive (volume résiduel <= 200 ml) et, si OK, commencer à doses complètes
- en cas d'intolérance digestive haute et en instillation jéjunale : une administration rapidement progressive pour atteindre les objectifs nutritionnels en 72 h peut être nécessaire
e. surveillance
- à la phase initiale: rechercher intolérance digestive haute par la mesure du volume résiduel gastrique toutes les 4 h, sans nécessité d'interrompre la nutrition
- changement de tubulures toutes les 24 h
- glycémie :à surveiller et contrôler par insulinothérapie
- état nutritionnel à apprécier et à suivre par le poids, l'albuminémie et la préalbuminémie
- position demi-assise (30°)pour diminuer le reflux gastro-œsophagien et les pneumopathies d'inhalation
- prévention de l'obstruction de la sonde de nutrition entérale par rinçage suffisant avec de l'eau (10 à 20 ml), à chaque prise médicamenteuse
- après extubation: l'alimentation orale peut être reprise après quelques heures de jeûne, de préférence sous forme pâteuse pendant 48 h
f. complications
- pulmonaires : bronchopneumopathies de déglutition (en cas d'ileus, de troubles de la déglutition et de la conscience), à prévenir par une position semi-assise (l'intubation trachéale ne protège pas complètement contre ce risque)
- mécaniques :
*sonde nasogastrique : sinusite, otite, oesophagite et reflux
*gastro-et jéjunostomies : péritonite, volvulus
- nausées-vomissements
traitement :
*correction du débit et de l'osmolarité
*traiter complications intercurrentes (ex. parésie sur morphiniques)
*éliminer le lactose (si antécédents)
*prokinétiques: métoclopramide (10 mg, 3 fois/j) et l'érythromycine (3 mg/kg, 3 à 4 fois/j sur 30 min), en l'absence de contre-indications et par voie intraveineuse
- troubles du transit intestinal (diarrhée, constipation)
* prévention :débit continu et constant, isotonie
* traitement : correction du débit et de l'osmolarité , éliminer une cause infectieuse (dont colite à Clostridium difficile),
ralentisseurs du transit (ImodiumRlopéramide 4 à 16 mg/j),
diète sans lactose (Nutrison Steriflo SojaR), apport de fibres
g. Situations particulières
- Insuffisance rénale aiguë : ne pas réduire l'apport en protéines. Méthodes d'épuration extrarénale, si nécessaire, pour contrôler l'accumulation de déchets azotés et permettre une nutrition entérale normale
- Insuffisance hépatique : apport normocalorique et normoprotéique. En cas d'encéphalopathie hépatique aiguë, la ration protéique doit être réduite à 0,5 g/kg/j de façon temporaire.
- Pancréatite aiguë compliquée :sonde de nutrition entérale à positionnr en aval de l'angle de Treitz et nutrition à débuter précocement (sauf ileus).
- Chirurgie viscérale majeure : nutrition préopératoire chez les patients sévèrement dénutris et précoce en postopératoire chez les malades dénutris, chez ceux qui ne peuvent se nourrir normalement (<60 % de leurs besoins théoriques) dans un délai d'une semaine et si complications postopératoires. Envisager pharmaconutrition
- Insuffisance respiratoire : pas d'indication pour l'immunonutrition
- sepsis: pas d'indication pour l'immunonutrition